Elle était en train de mourir. Elle sentait ses cheveux flotter autour d'elle. Ses yeux aveugles grand ouverts dans l'eau. Les mains d'Astauf la tenait fermement dans le lac. Elle ouvrait la bouche pour tenter de respirer mais de l'eau s'infiltrait dans ses poumons. La panique l'envahit. Elle n'avait pas envie de mourir, pas à 6 ans ! Ce n'était pas juste ! Et pourquoi les autres ne faisaient rien? Elle se redressa tellement soudainement qu'elle se retrouva au dessus de son agresseur. Maintenant c'était elle qui le tenait. Elle lui frappa le corps contre la roche. Un bruit sourd retentit. "Il est mort ! Tu l'as tué !" Un liquide poisseux lui recouvrait les mains. L'odeur du sang la prit à la gorge. Et le mort revenait à la vie. Il recommençait. Il lui plongeait la tête dans le lac. Sauf qu'il n'était plus rempli d'eau. De sang, de charognes et d'ossements. Elle voulut de nouveau respirer, mais ce fut le sang qui lui rentra par la bouche. On aurait dit de la rouille. C'était la mort. La mort était en train de l'emporter. A la place d'Astauf.

Noptia se redressa d'un seul coup, haletante.
Elle tourna la tête dans tous les sens, désorientée. Où était-elle, déjà? Comment se faisait-il qu'il fasse si froid? Et qu'elle ne se souvienne pas d'être venue ici? Et qu'elle soit couchée sur le sol?
Puis la mémoire lui revint.
C'est vrai, elle venait juste de se réveiller. Elle avait dormi à la belle étoile, faute d'abri à trouver. Et elle avait encore fait ce cauchemar. C'était immonde. Elle avait encore l'impression d'être couverte de sang, d'avoir un goût de rouille dans la bouche. Elle porta ses doigts à ses lèvres. Un oiseau poussa un cri auquel Noptia resta de marbre. Elle y était habituée. Elle se leva, chancelante, et se frotta les bras pour se réchauffer. Il faisait très froid. En même temps, il devait être tôt. Le soleil venait à peine de se lever, à travers ses yeux aveugle, Noptia discernait sa lumière à l'horizon. Un peu de clarté dans une brume noire et épaisse, en fait. Elle soupira longuement et resserra sa cape autour d'elle. Ses couettes blonds tombaient tristement autour de son visage d'ange. C'est vrai, on aurait dit la plus innocente des petites filles au monde, qu'elle était descendue du ciel, avec ses cheveux blonds et ses yeux saphir. Mais elle était à jamais salie par le meurtre. Un lourd sentiment de tristesse l'accabla, comme à chaque fois qu'elle y repensait. Pourquoi c'était tomber sur elle? Comme si ça ne lui suffisait pas d'être aveugle... En fait c'était précisément une conséquence de sa cécité qu'elle ait assassiner quelqu'un. Elle songea à la personne qu'elle était avant de l'avoir tuer. C'était une petite fille douce, calme, gentille. Maintenant son calme sautait quand elle se sentait menacée, par exemple si on la prenait par le bras. Douce? Moui... Difficile de l'être quand on ne rencontre personne. Gentille? Et avec qui au juste? Les animaux? La bonne affaire... La réalité c'était qu'elle était toute seule et qu'elle n'avait plus personne à qui porter de l'attention, voilà tout.

Elle se décida enfin à bouger. Elle se déplaçait lentement, à l'affut. Apparemment il n'y avait pas d'arbre dans les environs. Le sol était dur et rocheux. Tant mieux, il n'y aurait pas trop de trous. Un peu rassurée, elle accéléra l'allure. Grave erreur. Tout d'un coup, elle pose le pied sur une surface glissante qui craqua. L'eau glacée lui atteint le genou. De l'eau. La rivière était très légèrement gelée, et un seul petit caillou aurait suffit à la faire craquer. à la place de ce caillou, c'était le pied de Noptia qui s'était enfoncé dans la rivière. Son souffle se fit de plus en plus rapide. Elle était comme paralysée. Le souvenir de son rêve lui revint en mémoire. Mais elle n'arrivait plus à bouger. Elle entendit du bruit derrière elle. Quelqu'un venait. Elle eut soudain très peur. Et si il était comme Astauf? Et si il la noyait? L'eau glacée lui faisait mal. Elle avait la sensation d'être prise au piège. Alors que son blocage était seulement psychologique.

-Ah... ah.... AAAAAAAAAAAAAAAAH ! Laissez-moi ! hurla la fillette, en totale crise de panique.

-Hey! Il est où mon petit déjeuner?
Kalem releva brusquement la tête. Il avait beau chercher partout dans son petit coin personnel de la grotte, il ne retrouvait pas ces maudites baies qu'il s'était conservé pour le petit déjeuner. Malheureusement, elles avaient disparut. Peut-être par légère paranoïa, Kalem conclut vite qu'on lui avait volé. En même temps c'était plus probable que la théories que des ailes soient poussées sur le dos des baies pendant la nuit et qu'elles se soient envolées vers la liberté pour aller vivre sur une étoile...
Le jeune guerrier ours soupçonna directement Kurzan. Kurzan, c'était un guerrier de 15 ans avec un petit air prétentieux, très égocentrique et égoïste. Avec des tendances voleurs. Kalem ne pouvait pas le voir, même en peinture, mais Kurzan plaisait aux filles avec ses beaux yeux.
-KUUURRZZAAAAANN!!!
Le gamin guerrier se tourna vers Kalem. Avec une petit sourire narquois, il lui répondit d'un air innocent :
-Ouuuuiii?
-N'aurais tu pas par hasard fouillé dans mon coin personnel, par hasard trouvé des baies qui constituaient mon petit déjeuner et par hasard décidé de les manger? fit Kalem avec impatience
Le gamin éclata de rire, un rire moqueur révélant des dents étonnamment blanches.
-Je crois qu'il y a par hasard une grande probabilité que j'ai mangé ton petit déjeuner.
Kalem eut un accès de colère devant le toupet de ce gamin. En plus il avouait sans gène et sans honte. Le voyant énervé, Kurzan continua sa raillerie.
-En tout cas il était délicieux. je t'en aurai bien fait gouter mais j'ai tout dévoré. Et le plus drôle dans tout ça, c'est que tu ne peux rien faire à part aller te chercher un autre repas.
C'en était trop, Kalem poussa un grognement, et écarta violemment le jeune Kurzan de son passage. Peut-être un petit peu trop violemment même, car Kurzan fut projeté contre le mur qui était tout de même à cinq mètres et s'était pitoyablement écrasé contre celui-ci avant de glisser au sol.
Pour éviter les ennuis qui allaient arriver quand Kurzan allait prendre conscience de ce qui lui était arrivé, Kalem sortit de la grotte d'un pas décidé et partit en quête d'un nouveau petit déjeuner.
Après intense réflexion sur la question qui avait tourmenté tant de générations, "Que vais-je bien pouvoir manger?", Kalem prit la décision de manger du saumon. Il aimait en pécher, il y arrivait aisément et rien de tel pour démarrer une journée qui s'annonçait être bien fraiche. De plus c'était assez loin du clan, donc assez loin des ennuis.
Après un voyage assez calme, il arriva à, destination. Il y avait déjà quelqu'un. Une petite fille, douze ans au maximum, avec des couettes blondes. De dos, c'était les seuls choses que Kalem pouvait voir. Il avait beau chercher dans sa tête, il ne se rappelait pas avoir vue une fille comme elle au clan de l'ours. Et il connaissait tout le monde. Étonnant.
Kalem s'approcha un peu plus, et d'un seul coup, la petite fille cria.
-Ah... ah.... AAAAAAAAAAAAAAAAH ! Laissez-moi !
Mais qu'est ce qu'elle raconte?
Kalem fut en situation de totale incompréhension face à la crise de panique de la petite fille. Que lui arrivait-il? Il s'approcha pour comprendre. elle semblait se débattre à l'aveuglette. kalem voulut la clamer mais il se prit un coup de poing dans le bide. Elle avait de la poigne pour son âge. Cela dit quelque chose l'intrigua. Elle semblait frapper sans trop savoir où était sa cible.
Bon, il vaut mieux agir.
Le jeune guerrier ours lui attrapa les bras.
Déjà il vaut mieux l'éloigner d'un terrain glissant, elle risque de tomber à force de s'agiter comme ça.
Il la souleva sans difficulté, bien quelle se débatte encore avec ses pieds, la jeta dans l'herbe car il commençait à lâcher prise. Mais cela dit il y allait avec douceur, elle semblait un peu frêle.
Il put la voir de face. Ses yeux bleus se perdaient avec terreur dans le vide. Elle ne semblait pas vraiment le regarder lui, mais un peu à côté. il tenta de la rassurer, mais comme elle criait, il du parler assez fort, ce qui lui donna un ton autoritaire.
-He, calme toi!
Aucun effet
-Mais calme toi tu n'es pas en danger voyons!

Il s'approchait, oh non, oh non ! La peur avait envahi la fillette qui commença à se débattre dans tous les sens, mis à part son pied toujours enfoncé dans la glace de la rivière. Cette froideur faisait d'ailleurs extrêmement mal. Mais pour l'heure, la plus grande frayeur de Noptia était plutôt l'individu non identifié qui s'approchait d'elle. Il était derrière elle. Elle donna des coups à l'aveuglette et parvint à le toucher au ventre. Ouf. Elle était parvenue à le faire un peu reculer. Elle s'apprêtait à prendre la fuite quand une douleur lancinante au pied lui rappela qu'elle était dans l'eau. Elle frissonna. Elle aurait voulu se dégager et s'enfuir, mais cette peur là était paralysante. Des tas de souvenirs lui assaillaient l'esprit. Je l'ai tué ! se désola la petite fille. C'est ma faute si il est mort, il ne reviendra plus jamais, c'est trop tard. L'inconnu se tenait toujours là. Elle sentit soudain une pression sur son bras. Elle eut l'impression qu'elle tanguait vers l'eau. Elle retint sa respiration. Là, il allait plonger sa tête dans l'eau pour la noyer, et ensuite, elle le tuerait, lui aussi. Elle aurait un nouveau meurtre sur la conscience. Elle poussa un long hurlement.
L'être humain la souleva du sol et son pied cassa la surface de l'eau pour émerger à l'air libre. Néanmoins, sa panique insoutenable était trop violente pour pouvoir être reconnaissante envers l'inconnu. Elle continua à crier se débattant comme elle pouvait, en agitant ses jambes. Elle se fit jeter dans l'herbe. où était elle exactement? Toujours à côté de l'eau? Il voulait l'assassiner? Terrorisée elle continuait à crier de toutes ses forces.



-He, calme toi!



Elle entendit à peine la voix d'homme à travers ses hurlements. L'inconnu haussa le ton d'un air autoritaire qui n'eut pas un grand effet :



-Mais calme toi tu n'es pas en danger voyons!



Ah bon? Vraiment? Alors pourquoi il l'avait capturée? Paranoïaque, Nopti Albe? Et alors? Vu ses conditions de vie, c'était indispensable. Son souffle et la gorge en feu, le cri de Noptia s'interrompit. Son coeur battait la chamade. Elle leva les yeux vers le visage de l'homme qu'elle imaginait sévère. Elle se releva et recula avant de buter contre un arbre. Elle s'arrêta. Elle sentait quelque chose sous son pied. Une pierre? Sûrement. Elle la ramassa en la cachant dans sa main et localisa son ennemi. Grâce au son de ses déplacements légers, d'à peine quelques centimètres, et au bruit de sa respiration, elle put visualiser précisément son emplacement. Elle leva le bras et lança violemment sa pierre sur le guerrier. Au cri qu'il poussa, elle avait du atteindre le visage. Elle prit la poudre d'escampette mais l'inconnu la retint par le bras. Effrayée, elle le mordit et lui donna un coup de pied. Elle était juste devant un arbre et grimpa dessus à la vitesse de l'éclair jusqu'à ce qu'elle trouve une branche où se percher comme un oiseau. Elle se recroquevilla, tremblante, et se força à se calmer.

La gamine semblait vraiment terrorisée. Kalem se demanda qu'est ce qui pouvait l'effrayer à ce point. Kalem se savait grand et imposant, mais il savait aussi ne pas avoir une tête trop inquiétante.De plus, elle ne semblait pas vraiment regarder sa tête, mais plutôt au niveau du torse, et un petit peu à côté.
La petite fille passa sa main sous son pied. Kalem s'inquiéta, s'était-elle fait mal en trébuchant? Il s'approcha pour voir, mais au même moment elle releva son bras. Kalem eu le temps de comprendre ce qu'il se passait mais absolument pas le temps d'esquiver. En une seconde, une pierre était apparue dans la main de la petite fille puis s'était déplacée à grande allure entre les deux yeux du jeune guerrier ours. Une douleur vive s'empara de lui et il cria un juron . Il sentit le sang couler entre ses yeux, descendre le long de son visage et perler le long de sa barbe. Elle recommença à s'enfuir. Kalem eu d'un côté l'envie de la laisser s'en aller, mais d'autre côté la responsabilité de ramener la gamine à ses parents saine et sauve. il choisit la voie la plus compliquée, et avec un réflex qui l'étonna lui même attrapa le bras de la petite peureuse avec des problèmes plutôt graves d’agressivité et de paranoïa. Cela dit celle-ci s'accrocha à son idée folle de s'enfuir quoi qu'il en coute. Elle le mordit trop vite pour que Kalem s'écarte, et la douleur dans le doigt lui fit se sentir à la place des saumons qu'il mangeait habituellement. Il la lâcha contre son gré mais ceci ne sembla pas suffire à la gamine qui en plus lui assena un coup de pied dans le bide. Kalem ne sentit pas vraiment l'impact car elle était peut-être un peu frêle mais constata avec étonnement à quel point on pouvait être violent sous l'effet de la peur. Enfin elle grimpa dans l'arbre juste derrière elle. Kalem admira quelques instants son agilité et sa vitesse, puis comprit au même moment que comme elle se sentirait en sécurité provisoire, elle serait sans doute plus apte à parler sans frapper, envoyer des projectiles, mordre, ou peut être encore déraciner un arbre pour le faire tomber sur sa cible. Il essuya donc le sang sur son visage, pour avoir l'air moins barbare, se posa au pied de l'arbre, assez proche pour être visible mais pas assez pour donner l'impression qu'il veut grimper aussi. Il campa sur ses appuis au cas où elle tenterait de sauter de son perchoir ou de lui envoyer un nouveau projectile, puis il parla, avec ne voix la plus chaleureuse et rassurante possible.
-Il n'y a aucun danger tu sais, pas besoin d'être terrorisée comme ça...
Il réfléchit quelques instants, cherchant les bons mots, puis décida de se présenter. Si ça se trouve, elle le prenait pour quelqu'un d'autre.
-Moi c'est Kalem. Et toi, c'est comment? Tu viens de quel clan?
Il s'arrêta à ça pour l'instant, inutile de la noyer sous les questions.

Prostrée contre le tronc de l'arbre, du haut de sa branche, Noptia s'efforça de se calmer et de ralentir les battements de son coeur. La gamine essayait d'oublier la présence du guerrier en dessous d'elle. Elle décida de ne pas lui révéler ses faiblesses et détourna la tête afin qu'il ne se doute pas qu'elle ne voyait rien. Elle ferma les yeux et inspira à fond. Il était toujours là, il l'avait suivie. Elle l'avait entendu. Quand on est aveugle, les autres sens se développent pour combler le vide. Sa vie à la dure avait amplifier cela. L'homme lui parla d'une voix rassurante que Noptia ne jugea pas crédible :



-Il n'y a aucun danger tu sais, pas besoin d'être terrorisée comme ça...



Ah bon vraiment? Alors qu'est-ce qu'il lui voulait, hein? Si il croyait pouvoir l'embobiner avec des belles paroles, il se trompait grandement ! Et puis quoi encore? Il pensait vraiment qu'elle allait tout d'un coup lui faire confiance et devenir niaise à vomir? N'importe quoi !



-Moi c'est Kalem. Et toi, c'est comment? Tu viens de quel clan?



De quoi? Il était sérieux, là?
Quel clan?
Aucun. Nada. Rien. Et il ne connaîtrait jamais son nom, jamais. Il pouvait toujours courir. Mais c'était qui ce type, exactement? Pourquoi il la suivait? Il ne pouvait pas la laisser tranquille, tout simplement? ça lui rendrait service ! Et puis franchement qu'est qu'on en avait à faire de son nom? Inutile. Ce Kalem était encore plus inutile que Noptia. Elle rit un court instant. Mais ce n'était pas un rire joyeux, ou même triste. Il était doux, certes. Mais d'un certain côté, il était plutôt... dément. Un ricanement malsain, quoi. Le pauvre guerrier ne devait rien y comprendre. Un rictus moqueur s'étala sur son visage. D'une voix mielleuse, elle déclara à l'adresse de Kalem :



-Ta gueule.



Elle se tourna vers lui, hautaine. Avant que l'homme n'ait eu le temps de réagir, Noptia sentit la branche ployer sous son poids.
Puis elle se cassa.
La Sans-Totem tomba avec avant d’atterrir sur le sol à genoux. Le choc lui coupa le souffle. Elle avait entendu la branche cogner contre la tête du guerrier qui devait sûrement s'être légèrement affalé. Pauvre chéri, pensa ironiquement la fillette avant de lui asséner un coup de coude au visage. Toute cette émotion, c'en était trop. ça débordait. La proximité de l'eau, le danger de cet inconnu qui la prenait par le bras...



-Ecoute moi mon grand, j'ai pas de clan et mon nom je te le donnerais pas, ok? Alors si t'es pas content casse-toi et fous moi la paix avant que ça dégénère sérieusement.



Elle avait déballé cela d'un ton menaçant. Pas très convaincant de la part d'une gamine de 12 ans, mais sa folie la rendait effrayante.
Puis elle eut une illumination, si on peut dire. Elle vit, oui, vit, la scène de l'assassinat d'Astauf. Comme si elle avait le don de la vue.
Ses yeux s'écarquillèrent.



-Avant que je ne te tue, toi aussi.



Au départ, elle avait commencé cette phrase dans l'intention de lui faire peur, mais elle s'était transformé en gémissement. Elle se mit à paniquer sans raison valable. ça devenait dangereux, très dangereux. Elle recula mais son pied tomba de nouveau dans la rivière. Elle bondit en avant mais se cogna contre Kalem. Elle lui donna un coup de pied au genou et voulut fuir mais elle s'était fait mal aux côtes en chutant en même temps que la branche. Elle grimaça et se laissa tomber au sol.
Elle prononça intérieurement un juron. Qu'est-ce qui allait se passer maintenant? Et pourquoi ça n'arrivait qu'à elle ce genre de chose, hein?

Pas de réponse. Juste un rire. Un rire assez bizarre, malsain, qui fit presque avoir un frisson à Kalem, comme si il avait affaire à une espèce de schizophrène qui passait en quelques secondes d'une fille apeurée à une moqueuse intrépide. Elle ne le regardait même pas d'ailleurs. Puis elle parla, ce qui confirma un peu plus la théorie de la maladie mentale.
-Ta gueule.
PARDON?
Kalem écarquilla les yeux. Elle avait dit quoi là? Se rendait-elle compte de son âge? Se rendait-elle compte que vu la circonférence de sa tête Kalem pouvait lui broyer le crâne d'une seule main comme une noix? Comment une fille avec un instinct de survie aussi développé pouvait elle prendre le risque d'insulter les gens qu'elle ne connaissait pas ainsi alors qu'en plus elle fait à des gens qui font deux fois sa taille.
Mais elle m'a vu avant de dire ça? elle est aveugle ou quoi?
D'un seul coup, la branche sur laquelle elle campait se brisa. instinctivement, Kalem se prépara à ce qu'elle essaie de lui mettre un coup de pied dans sa chute. On ne sait jamais...
En réalité, c'est la branche qui l'attaque. Il voulut s'écarter mais la branche tomba sur sa tête avant qu'il ne se déplace. Il fut sonné quelques instants, mais reprit rapidement ses esprits avec une légère migraine de surcroit. ça commençait à suffire.
Ça ne semblait pas ce que pensait la petite fille qui continua par un coup de coude. Le jeune guerrier ours grogna de la douleur qui remontait dans son nez, et attrapa le bras de cette gamine qui méritait maintenant le grade pas très honorifique de peste. Puis elle reprit la parole. Sa voix insupportait légèrement le jeune guerrier ours.
-Ecoute moi mon grand, j'ai pas de clan et mon nom je te le donnerais pas, ok? Alors si t'es pas content casse-toi et fous moi la paix avant que ça dégénère sérieusement.
Mon grand?
Ses parents ne l'avaient vraiment pas éduquée correctement. Kalem savait que s'il avait parlé ainsi à son âge, il aurait sans doute fini la tête incrustée dans un arbre.
Kalem ne croyait absolument pas à son histoire. Elle avait forcément un clan. On ne pouvait survivre sans foyer à son âge.
Enfin elle avait proliféré une menace. Kalem eut un léger sourire. Il aurait aimé voir par simple curiosité ce qu'il se passerait si ça dégénérait. Ça aurait sans doute été assez comique. Puis d'un seul coup, elle repassa de la gamine rebelle et insolente à la petite adolescente totalement terrorisée. Ça se voyait dans son regard.
-Avant que je ne te tue, toi aussi.
Kalem ne savait pas trop si il devait rire ou avoir peur. Elle,semblait tellement sérieuse. Elle aurait donc un mort sur la conscience? A son âge? Ce traumatisme à lui seul expliquerait tout ses problèmes psychologiques. Non! C'était impossible. Elle racontait encore un mensonge.
La gamine fit un pas en arrière, et son pied se replongea dans l'eau. Puis elle se jeta sur lui, volontairement ou non difficile à dire, se cogna, le frappa au genou. Là, c'en était trop. Kalem en avait marre. Alors qu'elle tombait par terre, sans que le jeune ours ne sache pourquoi, il l'attrapa par le bras, la plaqua sur le ventre en lui bloquant ses deux poignets d'une main et en posant le genou sur ses jambes pour lui empêcher toute capacité de mouvement. Il se débrouilla pour ne pas lui faire mal mais pour lui faire comprendre que la fuite n'était plus dans ses options.
D'un ton énervé, il fit :
-Bon alors maintenant écoute moi bien.
Il reprit une inspiration :
-Même si je le peux je ne te tuerai pas car je ne le veux pas et même si tu le veux tu ne me tueras pas car tu ne le peux pas. Tu n'es absolument pas en danger mais si tu continues à te débattre ou à m'insulter tu risque de te faire mal. Donc fais attention.
Elle sembla vouloir répondre mais Kalem ne lui en laissa pas le temps. Il haussa le ton :
-Maintenant tu vas me dire quel est ton nom, ou tu habites et qui sont tes parents. Inutile de faire la muette j'ai tout mon temps. Et s'il faut t’assommer et te transporter comme un cadavre pour te ramener chez toi crois moi je le ferai. Donc maintenant tu as le choix. Sois tu parle, sois tu reste coincée là sans pouvoir bouger jusqu'à ce que tu ai des crampes.

[Ouais, ya de l'action, je surkiff =P]

Elle avait mal aux côtes mais elle ignora la souffrance et commençait à se redressa quand elle sentit une pression sur son bras. Elle n'eut pas le temps de lutter que le guerrier la plaquait face contre terre en attrapant ses deux poignets d'un seule mains et en s'appuyant sur ses jambes. Noptia avala de l'herbe mais la technique était efficace : elle ne pouvait plus bouger. Elle tenta de lui opposer un semblant de résistance, sans succès.
Le plus grand danger, c'était bien les êtres humains... Kalem prit la parole d'un ton énervé. Ce qu'il ignorait, c'était qu'elle était aveugle. Le fait de ne pas l'avoir dans le champs de vision de quelqu'un de normal ne la perturbait pas. ça changeait pas de d'habitude.



-Bon alors maintenant écoute moi bien.

J'ai que ça à faire de toute façon.

-Même si je le peux je ne te tuerai pas car je ne le veux pas et même si tu le veux tu ne me tueras pas car tu ne le peux pas. Tu n'es absolument pas en danger mais si tu continues à te débattre ou à m'insulter tu risque de te faire mal. Donc fais attention.



C'est ça. Il l'avait plaquée au sol et la retenait, et elle n'était pas en danger. Mais bien sûr. Elle ouvrit la bouche pour répondre mais il ne lui en laissa pas le temps et enchaîna une menace :



-Maintenant tu vas me dire quel est ton nom, ou tu habites et qui sont tes parents. Inutile de faire la muette j'ai tout mon temps. Et s'il faut t’assommer et te transporter comme un cadavre pour te ramener chez toi crois moi je le ferai. Donc maintenant tu as le choix. Sois tu parle, sois tu reste coincée là sans pouvoir bouger jusqu'à ce que tu ai des crampes.



L'idée de lui en faire voir de toutes les couleurs et de s'enfuir était bien tentante mais pas bien sage. Elle avait appris qu'il fallait toujours prendre les meilleures décisions pour sa survie. Elle prépara un instant sa réponse. Son nom? Noptia. Où elle habite... Nulle part. Ses parents?

*-Elle est traumatisée, c'est évident.
-mais elle a tué ce pauvre garçon !
Nopti Albe, elle a six ans. Elle pleure. Elle tira sa mère par sa robe.
-Papa... Maman... Pardon...
Ils ne la réconfortent pas.
-C'est bon, Noptia.*

Après son bannissement, ils ne l'avaient pas cherchée. Elle n'en était même pas sûre, elle ne savait pas ce qu'ils étaient devenus. La seule personne qui semblait encore croire en elle, c'était Ombre, sa cousine. Alors elle devait répondre quoi, exactement? Il n'y avait aucune raison pour qu'elle déballe toute sa vie à cet étranger. Mieux valait mentir... Non, si elle mentait, aussi bien il la ramènerait au camp du clan qu'elle dirait ! La catastrophe. Elle ne voulait pas avoir encore plus d'ennuis. Elle ferma ses yeux aveugles et réfléchit. Il lui fallait une réponse. Ses membres la faisait déjà souffrir. Il était fort. Elle aurait dû y réfléchir à deux fois avant de l'insulter, il était énervé maintenant. Zut.



-Noptia. C'est mon nom. Et je t'ai déjà dit que je n'ai pas de clan.



Pour une fois, aucune agressivité, ni de peur dans sa voix. Elle avait juste envie de partir. Elle tenta de se dégager les poignets mais il les serrait trop fort.



-Lâche-moi, maintenant. fit la gamine en tentant de garder son calme. Il ne fallait pas qu'elle ait peur. C'était mauvais, d'avoir peur. Les autres ne la comprenaient pas. Et quand elle avait peur, ça les agaçaient.

-Noptia. C'est mon nom. Et je t'ai déjà dit que je n'ai pas de clan.
Tiens elle sait parler sans insulter?
A ce moment précis, Kalem se rendit compte quel point il était inutile de connaitre le prénom de cette gamine. En effet ça n'était pas parce qu’il l'appelait par son prénom que celle-ci allait l'écouter. L'autorité ne semblait pas fonctionner sur elle, bien que Kalem n'ait rien à dire là dessus, étant donné que c'était son cas aussi, mais elle était trop méfiante pour instaurer un climat de confiance qui permettait la discussion sans la violence.
Là deuxième information était par contre tout à fait gênante. Comment se faisait il qu'une gamine de son âge n'ait pas de foyer? Même si elle avait commis une faute grave, on aurait du lui pardonner, elle était sans doute trop jeune pour comprendre les conséquences de son acte.
Il réfléchit quelques secondes sans rien dire. La jeune fille reprit la parole. Son ton était devenu étonnement calme. Avait-elle comprit qu'il était inutile de s'énerver ou de paniquer?
-Lâche-moi, maintenant.
Tu crois que c'est si facile?
Kalem savait très bien qu'il ne pouvait au fond de lui laisser une fille aussi jeune dormir dehors. Mais il savait aussi qu'il ne pouvait rien faire. Alors il restait là sans bouger. La petite avait peut-être rajouté quelque chose, mais Kalem l'ignorait totalement. Puis il établit une solution provisoire. Il voulait comprendre pourquoi une pré-adolescente s'était retrouvée avec le privilège de dormir à la belle étoile jusqu'à la fin de ses jours. Mais pour ça, il devait lui faire comprendre qu'il ne représentait aucune menace potentielle.
Et comme le simple discours ne semblait pas fonctionner.
Avec son autre bras libre il lui attrapa les jambes et la souleva. Il la sentit paniquer.
-Tu vois cette rivière?
Il ne se doutait pas que non
-Si j'avais eu l’intention de te tuer, j'aurai juste eu à te lancer dedans de toutes mes forces. Vu les rochers qu'il y a en dessous et ta peur de l'eau, je n'aurai eu aucun mal à t’ôter la vie. Mais si je ne le fais pas, c'est pour une raison simple. Je pense que tu es asse futée pour la deviner.
Il la reposa au sol, mais la bloquait toujours.
-Maintenant j'aimerai comprendre pourquoi une fille qui a vécu si peu de lunes dort-elle à la belle étoile.

Le guerrier ne réagit pas tout de suite. Il était sourd, ou quoi? Enfin bon... Elle commençait sérieusement à s'impatienter. Et en plus, elle avait froid, plaquée dans les herbes gelées. Elle en avait marre. Il ne pouvait pas la lâcher et la laisser partir, tout simplement? Qu'est ce qu'il lui voulait, à la fin? Il comptait la retenir ici toute la journée? C'était bien joli, mais la fillette avait faim et si elle s'était aventurée sur ce territoire, c'est parce qu'il lui avait semblé plutôt riche en plantes, et donc en baies, et donc en nourriture, aussi. ça aurait presque été plus simple de chasser, tiens... Au lieu de venir ici pour se faire embêter par Kalem.
Soudain, il lui attrapa les jambes et la souleva, ventre face au sol. Noptia se mit à paniquer et à gigoter dans tout les sens. Et si il la jetait dans la rivière? Au qu'il la lançait d'une falaise ?

-Tu vois cette rivière?

La petite fille s'immobilisa. Donc, il ne savait au moins pas qu'elle était aveugle, c'était déjà un avantage. Mais pourquoi il lui parlait de la rivière ? L'hypothèse d'une noyade meurtrière se reforma dans son esprit et sa respiration s’accéléra.

-Si j'avais eu l’intention de te tuer, j'aurai juste eu à te lancer dedans de toutes mes forces. Vu les rochers qu'il y a en dessous et ta peur de l'eau, je n'aurai eu aucun mal à t’ôter la vie. Mais si je ne le fais pas, c'est pour une raison simple. Je pense que tu es asse futée pour la deviner.

Le guerrier reposa Noptia au sol, mais il la bloquait encore. Ben alors, pourquoi il ne la lâchait pas si il ne voulait pas la tuer? "si je ne le fais pas, c'est pour une raison simple..." c'est-à-dire? Laquelle? Il voulait la torturer avant? Là, Noptia sombrait dans la paranoïa. En même temps... C'était le mieux à faire, après tout. Elle n'allait pas faire un grand sourire à tous les inconnus en lançant "je t'aime bien ! tu veux discuter avec moi? j'ai tué quelqu'un, c'est pour ça que je traîne ici toute seule ! et toi? qu'est-ce que tu fais là?". N'importe quoi.

-Maintenant j'aimerai comprendre pourquoi une fille qui a vécu si peu de lunes dort-elle à la belle étoile.

Noptia eut un hoquet nerveux. Si il savait à quel âge on l'avait chassée du clan... Elle ne pouvait pas lui répondre. Les cris de cette journée lui revinrent en mémoire, et surtout le passage fatal. Elle ferma les yeux. Oublies ça. Mais la culpabilité la prit à la gorge. Elle se débattit l'espace d'un instant, sans succès. Elle voulait partir, maintenant. Vraiment. Elle tourna la tête le plus possible vers son "adversaire" et réussit presque à être en face, mais son regard se posa ) côté, alors qu'elle pensait le fixer au visage. L'incfortabilité de sa position lui arracha un léger craquement aux épaules qu'elle ignora avant de lancer à Kalem :

En quoi ça te concerne? Je ne t'ai rien demandé ! Laisse moi partir !

Sous l'étonnement, sûrement, le guerrier relâcha un peu son éteinte sur les bras de Noptia, ce qui lui permit de se dégager. Elle se mit alors à tenter frénétiquement de libérer ses jambes, mais Kalem était trop lourd. Forcément, vu la taille de la fille... Elle chercha à tâtons un objet qui pourrait servir de projectile, n'importe quoi. Ses mains passèrent près d'un bâton qu'elle ne remarqua même pas.

La petite fille se sentit obligée de se tourner pour répondre, ce qui lui valut un joli bruit d'os qui craque ce qui fit tirer une grimace. Puis elle plongea son regard droit dans s... son épaule, et prit la parole :
-En quoi ça te concerne? Je ne t'ai rien demandé ! Laisse moi partir !
Kalem commençait sérieusement à se poser des questions. Elle ne semblait pas spécialement timide vu le langage qu'elle employait mais ne l'avait pas regardé dans les yeux. Il desserra légèrement sa poigne et la gamine réussit à se libérer, d'au moins un bras. Le reste était bien trop bloqué. Puis il remarqua qu'elle tâtonnait le sol comme si elle avait les yeux fermés. Pourtant, ça n'était pas le cas. Il soupira :
-T'es vraiment incorrigible petite...
Puis commença à la lâcher en disant :
-Bon OK, je te lâche. Mais laisse-moi t'offrir un repas. Tu m'as l'air bien maigre, cela doit faire longtemps que tu n'as pas mangé de viande.
Il relâcha brusquement prise, et s'écarta rapidement au cas où elle essaie de l'attaquer ou de lui envoyer un caillou dans le nez.
Elle se retrouva sur pied en une demi seconde à peine. Plutôt agile, cette gosse. Puis elle le toisa d'un air méfiant.
Envahi par le doute, Kalem essaya quelque chose. Il leva son poing jusqu'à ce qu'il devienne menaçant, ais très doucement pour pas que ça s’étende. Aucune réaction de la part de la petite fille. Pour Kalem, tout devint clair. Le fait qu'elle cherche à tâtons, son regard aléatoire, son manque de réaction face aux actions, tout devenait logique. En plus d'être abandonnée, la gamine était aveugle. On surpassait presque la caricature du parent monstrueux.
Celle-ci justement reculait, doucement, comme de peur qu'on la poursuive. Kalem fit avec un léger sourire :
-Tu sais, si tu continues à reculer comme ça, tu vas rater la racine et te casser la figure. Mais je suppose que tu ne l'avais pas vue, comme tu ne me vois pas en ce moment ou comme tu ne vois pas où tu te trouves...
Puis il ajouta, avec plus de sérieux :
-Tu ne t'en sortiras pas toute seule. Tu vas devoir apprendre à accepter l'aide des autres...

L'attente se fit longue aux yeux de Noptia, mais finalement, le guerrier soupira :

-T'es vraiment incorrigible petite...

La fillette ne dit rien, tendue. Kalem commençait à desserrer sa prise. Tant mieux. Il déclara :

-Bon OK, je te lâche. Mais laisse-moi t'offrir un repas. Tu m'as l'air bien maigre, cela doit faire longtemps que tu n'as pas mangé de viande.

Il la relâcha brusquement et tandis que Noptia l'entendait reculer (par crainte d'elle? Non, quand même pas...), elle se lança en arrière en sautant légèrement pour atterrir sur ses pieds. Méfiante, elle localisa le guerrier.
De la viande? Un repas? La tentation se fit grande, mais la crainte était aussi présente. Elle avait appris à se méfier des autres. Bon, elle était peut-être maigre, mais pas tant que ça, non? Remarquez, elle n'en savait absolument rien... Elle ne savait même pas à quoi elle ressemblait. Il vaut mieux s'en aller, songea la fillette même si la faim lui dévorait le ventre rien qu'à l'idée de croquer dans de la bonne viande. C'était plus prudent. Chose étrange, le guerrier ne semblait pas du tout bouger. Noptia commença a reculer lentement de peur que Kalem la suive. Elle n'aimait pas cette situation. Elle n'aimait pas être en contact avec les autres, c'est tout. Elle en avait bien le droit. Chacun son chemin, et elle avait choisi du ne plus jamais s'approcher des autres. En fait, maintenant qu'elle y pensait... Elle aurait quatorze ans dans quelques lunes.
De toute façon, personne ne voudrait faire une cérémonie pour elle, alors... Même pas la peine d'y songer.
Kalem lui dit alors :

-Tu sais, si tu continues à reculer comme ça, tu vas rater la racine et te casser la figure. Mais je suppose que tu ne l'avais pas vue, comme tu ne me vois pas en ce moment ou comme tu ne vois pas où tu te trouves...

Oh non. Il savait qu'elle était aveugle. Comment il avait fait? Maintenant qu'il savait ça, il pouvait utiliser sa cécité contre elle... Il ajouta d'un air sérieux de celui qui s'y connait :

-Tu ne t'en sortiras pas toute seule. Tu vas devoir apprendre à accepter l'aide des autres...

Noptia stoppa net.

ça fait des lunes et des lunes que je m'en sors toute seule. Je n'ai pas besoin d'aide.

Mais son ventre gargouilla, contrant du même coup ses paroles. Agacée, Noptia s'assit d'un air résigné. Pour cette fois, elle accepterait ce repas. Mais ensuite, elle se débrouillerait.

-Ça fait des lunes et des lunes que je m'en sors toute seule. Je n'ai pas besoin d'aide.
Sa réponse, toujours à peu près la même. Par contre sa réaction était différente. Elle s'était arrêtée. Soit une feinte pour repartir de plus belle, soit une preuve incontestable que cette gamine parlait la langue des humains. Bien que cela paraisse logique, Kalem ne pouvait s'empêcher d'émettre quelques doutes à ce sujet.
Mais d'un seul coup, comme en contradiction avec ses paroles, la petite fille s'assit. Kalem comprit immédiatement à son regard frustré qu'elle se résignait à accepter de l'aide à cause de la faim. Il connaissait trop ce sentiment de liberté contrainte. Ce genre d'action lui faisait penser à lui même, légèrement allergique à l'autorité que son clan lui imposait mais obligé de s'y soumettre s'il voulait un foyer. Liberté et sécurité son parfois peu compatibles. Kalem aimait le danger.
Après une seconde d'étonnement par rapport à sa réaction, un sourire en coin se posa sur le visage du jeune guerrier ours. Il se sentait bien moins impuissant, et libéré d'un fardeau, celui de supporter la responsabilité de laisser une petite fille aveugle et fine comme une brindille partir dans une forêt plutôt hostile vu le climat de guerre et sans avoir rien dans le ventre. l'aide qu'il allait porter était moindre, mais elle était présente.
Sans plus attendre, il se transforma en ours, se dégourdit un peu les pattes puis se pencha au dessus de la rivière. Il remarqua dans son reflet la légère cicatrice provoquée par la pierre que la gamine lui avait lancée.
Puis ils plongea ses pattes. L'eau était glacée. Autant se dépêcher. Il vit sa première cible s'approcher. Il patienta, patienta, puis avec la fulgurance qui était permise pour un ours, donna un coup de patte. Le poisson vola sur la berge, Kalem s'empressa d'achever ses souffrances. Si un jour il devait être mangé, il préférerait que cela soit sans douleur. Puis d'un dernier coup de patte, il envoya le poisson juste devant les pieds de la gamine, qui patientait, assise mais à l'affut. Elle sursauta. Kalem éclata de rire intérieurement.
Il reprit sa forme humaine, et avec un sourire s'adressa à la jeune Noptia :
-Tiens avale ça. Mais fais gaffe, il y a des arrêtes.
Après quelques secondes de réflexion, il paraphrasa quelque chose qu'un vieil homme lui avait dit un jour, alors que le jeune Kalem avait à peu près ce caractère de loup solitaire dont était doté la gamine :
-Le feu est plus libre que toi, mais pour subsister, il a besoin de vent. Tout le monde à besoin d'aide, et celui qui ne sait pas l'accepter est voué à un triste sort...

Noptia patienta quelques instants. Kalem semblait rester immobile sans bouger, comme si elle avait soudainement fait preuve de démence. La fillette était persuadée qu'il la dévisageait. Mais c'était quoi, son problème? Il voulait l'aider, oui ou non? Elle détourna la tête d'un air un peu méprisant. Si il y avait bien une chose qu'elle détestait, c'était qu'on lui prête de l'attention. Quoi que... au fond d'elle... Mais c'était au fond, un point c'est tout, ça ne comptait pas.
Un léger bruit la surprit, suivis de pas lourds d'animaux. Kalem avait du se transformer, mais en quoi? La fillette réfléchit et fit appel à ses souvenirs. Il y avait huit clans : le loup marchait trop furtivement, ainsi que le renard, le rat, les loutres et le lion. Ce n'était pas non plus des bruits de sabots, donc ce n'était pas un cerf, et sûrement pas un aigle non plus. Donc, c'était un ours. Elle devait se trouver sur le territoire du clan de l'Ours. Pourquoi le guerrier ne l'avait-il pas chassée au lieu de lui offrir un repas? Elle ne le comprenait vraiment pas... Ce type était décidément bizarre. L'ours s'éloigna pour se placer tout près de la rivière. Il ne bougea pas pendant un moment après avoir percé la surface de l'eau, avec ses pattes antérieures. Tout d'un coup, Noptia perçut un mouvement sec mais rapide de la part de l'ours. Quelque chose retomba sur le sol. Noptia eut un sursaut quand le poisson fut envoyé juste devant elle. Elle le toucha du bout des doigts. Gluant et écailleux. Très appétissant. Mais elle n'allait pas faire sa difficile, ça devait faire six ou sept ans qu'elle n'avait pas mangé de poisson, alors...

-Tiens avale ça. Mais fais gaffe, il y a des arrêtes.

Cru?
La petite fille resta un instant muette sans savoir quoi faire. Pour lui, manger du poisson cru, ça devait être normal, c'était un ours. Mais elle, elle était juste... humaine. Au bout de quelques instant de blanc, il lui déclara :

-Le feu est plus libre que toi, mais pour subsister, il a besoin de vent. Tout le monde à besoin d'aide, et celui qui ne sait pas l'accepter est voué à un triste sort...

Noptia ne dit rien. Elle n'avait rien comprit du tout à ce que ce guerrier venait de lui dire. Même si elle était plus débrouillarde que les autres personnes de son âge, elle restait une gamine. Kalem avait reprit forme humaine. Elle "changea" de sujet en prenant le poisson dans ses mains.

-Euh... C'est bon le poisson cru?

Elle espérait qu'il avait saisi le sous-entendu.

L'air ahuri de la petite fille face à sa réplique lui fit se rappeler qu'elle n'avait pas plus de douze ans. Puis la gamine posa une question totalement hors rapport :
-Euh... C'est bon le poisson cru?
Kalem se prépara à répondre "Mais bien évidemment, c'est la meilleure chose du monde mais il eut le temps de constater que cette jeune fille, qui ne faisait pas parti du clan de l'ours, n'était donc sans doutes pas habituée à ce genre de repas. Avec un sourire gêné il rétorqua
-Oh, c'est vrai désolé. Ne bouge pas je m'en occupe.
Il s'éloigna un peu à la recherche d'un peu de bois, heureusement qu'il avait toujours un briquet à silex sur lui. Après une fructueuse recherche de bois mort qui n'était pas difficile vu la saison, il déposa le tout autour d'un cercle de pierres, rajouta quelques feuilles et brindilles pour lancer le feu et alluma. Il n'eut aucun mal a obtenir une jolie flamme. il récupéra le poisson que la jeune fille avait posé avec un léger dégout par terre, le transperça avec un bout de bois, et le fit cuire. Au bout d'une dizaine de minutes, le met était à point. Plus qu'à espérer qu'elle ne demande pas un accompagnement...
Il tendit la brochette de saumon devant les yeux toujours méfiants de la jeune fille qu'il l'attrapa avec un mélange de prudence et de voracité. Kalem eut un léger sourire, puis il se retourna pour aller se réchauffer les mains sur son feu.

[HRP : Désolé pour la taille, mais je suis fatigué là x)]

-Oh, c'est vrai désolé. Ne bouge pas je m'en occupe. lui répondit le guerrier ours d'un air un peu gêné.

Il se leva et chercha du bois pendant un moment. De bois mort, sûrement... En fait Noptia n'en savait rien, ça faisait trop longtemps qu'elle n'avait pas écouter quelqu'un faire un feu. Etrangement, ça lui rappelait des souvenirs au sein de son clan. Cette impression qu'on peut laisser une autre personne s'occuper de tout, qu'on a juste à attendre. C'était toujours comme ça, avant, et ça aurait dû l'être jusqu'à ses quatorze ans. Noptia se sentait clairement bizarre, maintenant. Le guerrier revint sur ses pas et déposa les branches au sol les une après les autres. Ensuite, il y eut un léger claquement et un bruit sourd. Il avait fait un feu. Noptia s'en approcha un peu. La sensation de chaleur lui picotait la peau. Elle avait l'impression que son visage allait se craqueler, soumis à ce changement de température.
Kalem planta deux bâtons dans le sol avant de sembler commencer à faire cuire le poisson. Le doux fumet de la chair en train de cuire vint titiller les narines de la petite fille dont la faim pris le dessus. Elle avait de plus en plus de mal à patienter.
Enfin, Kalem lui tendit la brochette de poisson qui la saisit prudemment. Mais elle avait tellement faim qu'elle n'était pas d'humeur à se soucier de piège ou de fierté.
Elle hésita un court instant avant de croquer dans la chair du saumon. Elle était tendre.
Elle mangea doucement pour éviter de se piquer avec des arêtes. Une fois le poisson terminé (mis à part le squelette et la tête qu'elle avait laissée, il ne restait rien), elle resta assise quelque minutes à se réchauffer près du feu. Elle songea quelques instants à la direction à prendre avant de se lever et de déclarer au guerrier du clan de l'ours :

Bon, merci pour le repas. Je m'en vais, maintenant.

Et elle partie aussi sec vers l'est. Vers les territoires du clan de l'Aigle, sûrement. Il lui sembla que Kalem lui avait dit quelque chose pendant qu'elle s'en allait, mais elle n'en était pas tout à fait sûre. De toute façon, elle n'avait pas entendu, alors ce n'était pas important. Elle reprenait sa vie vagabonde, et solitaire, alors autant s'éloigner le plus possible des gens qui voulaient bien l'aider, puisque ça ne menait à rien.

[court, mais bon... Tu peux poster encore une fois si tu veux ^^]